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Alzheimer : Droit de savoir, devoir d'anticiper |
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Emmanuel Hirsch
Professeur d’éthique médicale, université Paris Sud, président du Conseil scientifique de l’université d’été Alzheimer, éthique et société
À quelques jours de l’université d’été Alzheimer, éthique et société 2013, nous comprenons, par l’engouement qu’elle suscite cette année à nouveau, l’intérêt d’avoir retenu un thème de réflexion et de concertation qui concerne largement la cité, y compris au-delà du seul champ des personnes concernées par cette maladie : « Vouloir savoir. »
D’évidence s’impose a priori l’idée selon laquelle se savoir prédisposé à une maladie ou en être atteint permet d’être en capacité d’exercer une forme de contrôle sur son existence et ainsi de mobiliser les capacités et ressources indispensables aux stratégies à mettre en œuvre pour faire face. Cela ne saurait être possible dans l’ignorance. Certains militants de la cause sida scandaient dans les années 1980 « Le silence tue » ; en 2013 la formule serait : « La méconnaissance tue ». De telle sorte que cette aspiration à savoir signifie en fait le refus de la dissimulation, du mensonge et de la tromperie. Une volonté double : celle d’être rassuré s’il s’avère que le soupçon d’une maladie est infondé ; celle d’être au clair avec soi et d’adopter, autant que faire se peut, une posture individuelle proactive, préférable à la persistance d’un doute insupportable, si malheureusement la suspicion de maladie se confirme par son diagnostic.
S’agissant d’une maladie neurologique chronique, de manière quelque peu théorique le droit à la révélation d’une vérité qui concerne l’intégrité de la personne semble peu discutable. On ne saurait dissimuler ou confisquer cette information certes des plus sensible, mais dont la portée justifie des mesures anticipatrices, ne serait-ce que pour sauvegarder les intérêts et les droits de la personne et de ses proches.
Toutefois, en pratique, si l’on s’exonère des propos convenus relatifs à la pertinence de protocoles d’annonces dument structurés et validés par des compétences reconnues, que signifie pour une personne l’annonce d’une maladie d’Alzheimer ou de toute autre affection cérébrale chronique ? La vérité qui exprime semblable pronostic n’est-elle pas assimilable à un verdict insoutenable, y compris lorsque quelques promesses médicales tentent d’atténuer la gravité des circonstances ? Qu’en est-il dès lors du statut de ce savoir, de son effectivité même, de la signification que prend sa transmission, si la personne le redoute au point d’être dans l’incapacité de se l’approprier ? Au point de ne pouvoir l’intégrer, tant ses conséquences bouleversent ce qu’elle est à l’instant présent et ce que représentaient jusqu’alors ses projets d’avenir.
Une double peine : celle de la maladie elle-même et celle d’être en situation non seulement de la combattre mais d’anticiper ses conséquences humaines et sociales en y investissant des moyens qui bien souvent font défaut ?
Les puristes font valoir l’intérêt d’anticiper, au moment où il est encore possible de décider pour soi, en toute lucidité, et d’organiser ainsi un futur dont on sait pourtant les incertitudes, les équivoques et les fragilités. Pour certains même, le « devoir de savoir » relèverait d’une obligation morale, d’une logique de responsabilité, ne serait-ce qu’à l’égard des tiers qui délégitimeraient le « droit de ne pas savoir » lui-même reconnu dans la loi relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé du 4 mars 2002. Peut-on se satisfaire, sans autre forme, de cette idéologisation d’une assignation à connaître et assumer des responsabilités consécutives au fait d’être malade ou susceptible de le devenir ? N’est-il pas là en quelque sorte une double peine : celle de la maladie elle-même et celle d’être en situation non seulement de la combattre mais d’anticiper ses conséquences humaines et sociales en y investissant des moyens qui bien souvent font défaut ?
Quels recours solliciter pour être en capacité de se projeter dans des lendemains qui renvoient aux terrifiantes visions d’une précarisation de l’existence, de l’errance et de l’incommunicabilité, voire de la relégation sociale dans des institutions ? Quels critères privilégier pour ordonnancer un projet de vie à ce point compromis et dépendant de tant de facteurs qui ne tiennent pas exclusivement à l’évolutivité de la maladie ? Quels partenaires, proches ou professionnels, associer, et selon quelles modalités, à l’anticipation de décisions dont on ne saurait fonder la pertinence sur les seules conceptions et représentations péjoratives, désastreuses et dépourvues « d’horizon d’espérance » ? Ne serait-il pas tout aussi justifié de ne pas renoncer à envisager la persistance d’une pensée qui demeure, certes sous une forme autre, et toujours avec des possibles même atténués, jusqu’au terme de l’existence ? Sans quoi il apparaîtrait moins invraisemblable d’estimer que certaines personnes pourraient, à un stade donné encore compatible avec l’idée qu’ils se font de leur autonomie et de leur dignité, revendiquer une assistance médicalisée à la mort. Cela pour s’éviter en quelque sorte le pire, dès lors que la seule issue serait la dépendance radicale et la perte de soi.
Comment situer le curseur de l'anticipation ?
Les questions sont amples, complexes, délicates. Elles ne concernent pas que la maladie d’Alzheimer qui apparaît plutôt comme une expression des extrêmes et donc l’incitation à pousser nos raisonnements jusque dans leurs derniers retranchements. D’un point de vue tout aussi recevable que les questionnements précédents, est-il à ce point légitime de compromettre d’emblée ce qui demeure encore stable, indemne de la maladie, propre à la sphère privée et à l’espace relationnel qui s’avèreront pourtant indispensables face à la maladie ? L’irruption d’un savoir radical menace de les abolir sans que la moindre prévenance ou protection puisse éviter de les dénaturer. N’est-ce pas, d’une certaine manière, sacrifier dans la précipitation une certaine assise structurante, voire une faculté d’insouciance qui n’équivaut ni à l’inconsistance des sentiments ni à une quelconque forme de lâcheté ? Cela au prétexte d’un intérêt supérieur qui relèverait d’une vision quelque peu théorique, porteuse d’une violence bien contestable, soucieuse de promouvoir le modèle d’une responsabilisation des individus ainsi en demeure d’assumer le registre d’une autonomie qui les enferme plutôt dans une fonction privative de tout autre choix plus personnel. Entre « droit de savoir » et « devoir d’anticiper », à quel point situer le curseur entre liberté individuelle et contrainte selon des normes assignées avec des finalités qui peuvent s’avérer contraire aux idées de respect et de bien-être qui doivent prévaloir dans nos approches éthiques. Tout particulièrement dans les circonstances de vulnérabilité qui interpellent la vérité de nos résolutions.
La maladie d’Alzheimer évolue, nous affirme-t-on, de manière lente et subreptice longtemps avant d’en déceler les premiers signes. Au point d’inciter certains médecins et chercheurs à souhaiter rendre possible sa détection la plus précoce possible, avant qu’elle ne se soit trop développée pour être ralentie dans sa progression et peut être même, à terme, guérie. Autant d’arguments scientifiques qui interviennent désormais pour éclairer autrement cette « volonté de savoir » non pas seulement d’un point de vue philosophique, mais comme élément stratégique impérieux dans la prévention ou le traitement de la maladie, expression même d’une forme actuelle du « souci de soi ».
Comment impliquer le futur dans un présent dès lors totalement conditionné par la perspective d’une maladie qui ampute progressivement la personne de ce qui lui est constitutif en tant que tel ?
Comme pour d’autres maladies, par exemple génétiques, les personnes plus concernées, du fait d’antécédents familiaux ou de considérations qui leurs sont propres, se doivent ainsi d’arbitrer entre l’intérêt de se voir révéler un savoir fait aujourd’hui d’hypothèses et de probabilités soumises à nombre de discussions, et celui de préserver non pas une ignorance mais une certaine conception de l’existence humaine exposée par nature à des inéluctables qu’il serait à bien des égards vain de vouloir systématiquement anticiper. L’argument qui peut imposer cette conception selon laquelle savoir est préférable à douter ou à ignorer, y compris lorsque les capacités d’infléchir la fatalité d’une annonce s’avèrent à un moment donné limitatives, tient bien souvent, pour des personnes susceptibles de s’affaiblir, y compris dans leur faculté de discernement, à leurs obligations morales à l’égard de leur propre dignité et du devenir de leurs proches. Il conviendrait en quelque sorte d’impliquer le futur dans un présent dès lors totalement conditionné par la perspective d’une maladie qui ampute progressivement la personne de ce qui lui est constitutif en tant que tel. Cela n’équivaut-il pas en fait, non pas à anticiper les conséquences de la maladie, mais à l’anticiper au point de la vivre d’emblée avant même qu’elle ne s’exprime dans ses symptômes et soumette alors aux transformations qui affectent si profondément l’identité de la personne et, d’une certaine manière, sa « présence au monde » ?
D’autres aspects de l’approche touchent au contexte au sein duquel s’expose la révélation d’une maladie au pronostic sévère, du point de vue de l’image qu’a la personne de ce qu’elle devient, mais également des représentations sociales de cette maladie trop habituellement assimilée à une forme de déchéance. Comment préserver la confidentialité d’une information dont l’impact est flagrant avec des conséquences susceptibles de compromettre la vie sociale de la personne et de ses proches ? Anticiper la maladie, certes, mais qu’en est-il de ces savoirs précoces qui pourraient abolir les droits de la personne, ne serait-ce que dans son aspiration à maintenir une activité professionnelle, une autonomie dans la gestion de son existence, une capacité de faire valoir ses choix au regard de ce qui lui est précieux, de ce qui importe pour elle, voire de ses biens ? Les mesures de protection précocement mises en place ne constituent-elles pas parfois une entrave à la liberté fondamentale des personnes, une mise sous tutelle avant l’heure, un renoncement contraint à toute notion de devenir dès lors, par exemple, que l’accès à un prêt bancaire ou à une assurance est difficilement envisageable dans le contexte de la maladie grave ? Devrait-on, au nom d’un idéal de vertu, admettre un deuil anticiper de ce que nous sommes, afin de précéder la maladie dans ses ravages annoncés et avoir ainsi le sentiment de ne pas lui laisser le dernier mot ?
L'appel à une mobilisation des compétences
Il nous faut résister aux modes et aux normes ambiantes pour implanter un questionnement rigoureux et résolu qui ne saurait se satisfaire de préconisations aléatoires, de solutions systématisées, de conditionnements soumis aux pressions quelles qu’en soient la nature, les justifications et les fins. Les options se doivent d’être examinées et confrontées du point de vue de leurs enjeux et de leurs conséquences, puis, lorsque la société est directement concernée puisque ses valeurs et ses représentations sont engagées, débattues dans le cadre de concertations publiques. Car l’anticipation ne saurait relever de la seule responsabilité, parfois exercée dans la solitude et le désarroi d’un huis clos, alors que les perspectives d’une « vie malade » tiennent pour beaucoup à la pertinence et à l’effectivité des ressources mobilisées dans l’accompagnement, le suivi, le conseil, le soutien de la personne, en termes de recherche, de traitements, de soin et tout autant de solidarités publiques. Dès lors, nous comprenons mieux ce que l’anticipation signifie d’un point de vue éthique et politique : l’appel à une mobilisation des compétences et des solidarités, qui seules permettent à la personne et à ses proches d’assumer ensemble un présent non seulement responsable mais assumé avec le sentiment de ne pas être abandonné ou soumis à la condition du dément. Celui qui est relégué aux confins de nos préoccupations sociales.
C’est rappeler ici la signification politique d’une université d’été comme la nôtre, soucieuse de la personne et ouverte sur une concertation publique responsable et mobilisatrice.
Inscriptions en ligne et programme

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Université d’été : en avant-première, quelques réflexions |
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Nous vous proposons en avant-première quelques réflexions sollicitées auprès de différents intervenants. Elles sont significatives de ce que sera la tonalité de notre université d’été et la diversité des approches constamment préoccupées de l’intérêt direct de la personne malade et de ses proches.
Droit de savoir, volonté de savoir, obligation de savoir
Catherine Ollivet
Présidente de France Alzheimer 93, Espace éthique/IDF
Quand les impressions floues prennent corps et consistance, que l’intuition criante d’une vie familiale partagée vous assaille d’une pensée devenue incontournable — « Il se passe quelque chose, et je crois savoir ce que c’est…Alzheimer… » —, chacun d’entre nous réagit d’une façon particulière, en lien avec son caractère, son histoire de vie personnelle et son histoire de lien avec ce proche, sujet de toutes les inquiétudes, de toutes les interrogations.
Peut-être faut-il que la torture du doute devienne plus insupportable que celle de l’inquiétude pour qu’un membre de la famille se décide à accompagner activement son proche dans une démarche diagnostique… pour « savoir » ? Et peut-être pour agir ?
Car le plus souvent, et surtout si la personne éventuellement atteinte est âgée, l’initiative de cette démarche et sa concrétisation en consultation mémoire ou chez un spécialiste, relève de l’engagement d’un proche. Parfois la personne s’oppose violemment à une telle proposition, ou accepte… pour refuser au dernier moment de monter dans la voiture. Il faudra alors, annuler et reprendre un autre rendez-vous, et revivre chaque jour le doute, l’inquiétude, l’impuissance.
Cette démarche qui aboutira à un diagnostic « le plus tôt possible », si ardemment demandé par les spécialistes et les chercheurs, est dans la vraie vie, précédée de semaines ou même de mois, de difficultés morales et matérielles qui épuisent les proches, et trop souvent ignorées des professionnels.
Lorsque la connaissance contribue à soulager les inquiétudes. Quel intérêt pour le diagnostic différentiel ?
Florence Pasquier
Professeur de neurologie, CHRU de Lille
Les personnes qui consultent et peut-être plus encore les proches qui les accompagnent, ont généralement envisagé la possibilité que les troubles cognitifs soient dus à une maladie grave. Le doute est présent, et selon la conscience des troubles les personnes se sont plus ou moins préparées à une mauvaise nouvelle. Elles ont besoin d’être écoutées, de se sentir comprises, prises au sérieux, avec bienveillance et professionnalisme. Après avoir rectifié les éventuelles interprétations erronées, au rythme qui leur est propre, expliquer la maladie permet de faire face. Les personnes malades et leur accompagnant proche sont soulagés de pouvoir échanger, prendre ensemble des décisions, exprimer leurs souhaits pour l’avenir. Expliquer la maladie à chaque étape, les signes qui s’y rapportent, mais aussi apprendre à ne pas mettre tout ramener à la maladie évitera bien des malentendus, des mauvaises décisions et des mauvais traitements. Faire le diagnostic précis d’une autre cause, expliquer les similitudes et les différences avec la maladie d’Alzheimer dans laquelle la personne malade et son accompagnant ne se retrouvent pas, concourent à les soulager, leur redonner confiance, et est essentiel pour apporter le meilleur accompagnement.
Identifier et accompagner les fragilités
Elisabeth Quignard
Médecin gériatre, unité de soins palliatifs, Centre hospitalier de Troyes
L’approche gériatrique de la fragilité retrouve un concept complexe, en raison de la multiplicité des formes de réaction individuelles face aux déficiences fonctionnelles qui se rencontrent avec l’âge.
Malgré une définition encore floue et l’absence de consensus, la fragilité est une entité opérationnelle sur le plan médical, car il convient de la détecter avant que n’apparaissent ses conséquences, pour tenter de mettre en place des aides efficaces et pour pouvoir anticiper les situations de crise.
Ce concept n’a cessé d’évoluer depuis une trentaine d’années, passant d’une approche purement physique à une approche plus globale prenant en compte le parcours de vie de la personne et son environnement psycho-social, puis à une approche plus dynamique essayant de repérer l’entrée dans un processus de fragilisation, avec ses risques de morbidité et ses conséquences en cascade. On s’attache ici à prendre en compte l’impact possible des évènements défavorables au regard de la vulnérabilité de la personne, et à mobiliser les capacités fonctionnelles de réserve, dans une optique de prévention.
Depuis longtemps, la maladie d’Alzheimer apparaît comme un des critères de fragilité, mais les liens entre troubles cognitifs et fragilité apparaissent encore complexes, même s’ils sont de plus en plus étudiés ; on a pu montrer, par exemple, qu’un état de fragilité initial, ainsi qu’une progression rapide vers la fragilité sont significativement liés à l’apparition d’une maladie d’Alzheimer.
Par ailleurs, si l’on considère que la fragilité est inhérente à l’existence humaine, on peut lui reconnaître une certaine valeur qui va guider les soignants et les accompagnants dans le prendre soin de l’autre. La fragilité convoque à une dimension plus humaine du soin, à une relation d’alliance, dans une expression de solidarité humaine incontournable.
Le soignant peut aussi prendre conscience de sa propre fragilité, de sa porosité à la vulnérabilité de l’autre, et s’en servir comme support pour l’accompagner, dans une relation faite de réciprocité et d’authentique rencontre.
C’est véritablement l’éthique comme une responsabilité pour autrui, portée par le sens du fragile, dans le sillage de Paul Ricœur.
Dans cette optique, l’annonce d’une maladie grave comme la maladie d’Alzheimer, surtout à une personne fragile et entravée dans sa pensée et son identité, doit constituer impérativement de la part du médecin et de l’équipe soignante un engagement de soutien et d’accompagnement dans la durée, envers le patient et envers ses proches, dans ce qu’ils vont avoir à vivre.
Ce que signifie cette première confrontation
Pascale Gérardin
Psychologue clinicienne, CMRR Lorraine, CHU de Nancy
Egarer ses clés ou ses lunettes, rechercher durant de longues minutes le nom de cet écrivain que l’on sait pourtant que l’on sait, oublier un rendez vous… Quoique forts agaçants, tous ces exemples font partie de la phénoménologie de la vie quotidienne de chacun et témoignent si besoin en est d’une vitalité plutôt saine et dynamique de la mémoire. Il n’est pas de mémoire sans oubli, et la mémoire humaine est par essence une mémoire oublieuse.
Pourtant dans ces démêlés que chacun entretient au mieux tout au long de la vie, avec ces deux composantes d’une même fonction, certains d’entre nous vont appréhender d’autres ratés ou défaillances préfigurant pour eux-mêmes des désordres cognitifs plus durables et délétères. Pourquoi, comment ? Et que faire de ces premiers éprouvés et de ces premiers signes qui émergent à la conscience. Pour certaines personnes, il y a alors sentiment d’urgence, et urgence surtout à consulter. Pour d’autres s’accordant à masquer et élaborer des arrangements possibles, c’est la banalisation ou la rationalisation par l’âge, l’anxiété, ou le surmenage, et c’est l’entourage qui prend à son compte le devant des plaintes. Pour tous, c’est le temps de la modification des représentations, insidieusement, subrepticement avec une appréhension de la réalité qui sera forcément différente de ce qu’elle était.
Qu’est ce qui distingue « les oublis ordinaires » d’autres oublis plus péjoratifs ? Qu’est ce qui fait que la personne s’alarme davantage lorsqu’une information n’est plus accessible ? L’oubli n’est plus normal et devient pathologique à la lumière de ces éprouvés comme un « un sentiment d’étrangeté ». Dans ces moments de fragilisation et sensibilité toute particulières, les premières rencontres avec les professionnels dans ce contexte de médicalisation sont à la fois essentielles et déterminantes. Des éprouvés subjectifs aux symptômes cliniques, les différents examens médicaux, neuropsychologiques et biochimiques tenteront de préciser ce qu’il en est d’une « probable maladie ». Mais dans ce temps tout particuliers, il s’agira là aussi d’écouter et peut-être avant tout, ce que la personne a, à nous dire d’elle-même en première personne. C’est l’écoute de « la maladie du malade » pour reprendre Canguilhem, mais aussi l’écoute des plaintes de la personne ou l’absence de plainte, de ses certitudes parfois. Cette écoute est une haute exigence éthique, elle est le préalable nécessaire aux consultations suivantes, voire aux prises en soin futures. Elle est le point de rencontre possible entre ce que vit la personne, sa subjectivité et le récit transmis, entre professionnels et personnes accueillies et dans des champs d’expertises différents à défendre.
Partager avec son proche l’exigence de savoir
Judith Mollard
Psychologue clinicienne, Association France Alzheimer
Mette en mots, à l’intérieur du couple, l’effraction de la maladie ; faire circuler, au sein de la famille, une parole même douloureuse ; autoriser son proche malade à dire les espoirs qu’il nourrit et les souffrances qu’il traverse ; sont des partages indispensables à la survie psychique de la personne malade et de son entourage.
A partir du moment où une démarche diagnostique a été menée et un diagnostic annoncé, l’accès au savoir sur la maladie et ses conséquences doit être libre et adapté à chacun pour permettre à la personne malade et à ses proches d’appréhender progressivement une réalité qui menace déjà depuis un certain temps mais qu’il va être maintenant nécessaire d’apprivoiser progressivement.
Cependant ce savoir n’a d’intérêt que s’il est valorisé et mis à profit pour un meilleur savoir vivre la maladie. Chaque personne va ensuite organiser et élaborer son savoir en fonction de ses intérêts et besoins.
Temps initial de l’engagement et du projet de soin
Béatrice Le Naour
Médecin généraliste, praticien attaché en psycho-gériatrie, Hôpital Bretonneau, AP-HP
Aussi douloureuse soit son annonce, le diagnostic de maladie d'Alzheimer ne doit plus apparaître comme une fatalité, mais au contraire comme l'engagement du médecin à accompagner son patient, et l'entourage de celui-ci, tout au long de l'évolution de la maladie.
Pour cela, dès l'évaluation faite de la compréhension de l'annonce, il faudra proposer un projet de soin qui se construira pas à pas, au rythme du patient. De même, il convient de ne pas tout dire tout de suite, mais de délivrer progressivement les informations concernant la maladie et les difficultés qui en découlent, au fur et à mesure de leur survenue. Le médecin rassurera le patient sur la prise en compte de son consentement et de ses choix, tout au long de l’élaboration du projet de soin et lors des prises de décision le concernant. La prise en charge se fera en collaboration avec de nombreux autres professionnels. Grâce à la mobilisation de ce large réseau et au soutien de l'entourage, la personne malade pourra alors entrevoir l'avenir, non plus dans la seule perspective de sa perte d'autonomie, mais en considérant au contraire les capacités préservées et le respect de sa personne.
Reconstituer des formes d'alliance au sein d'une famille
Geneviève Demoures
Psycho-gériatre, Le Verger des Balans, Annesse-et-Beaulieu
Les temps de l'annonce diagnostique, s'ils s'inscrivent dans une démarche d'écoute précautionneuse, vont interroger inévitablement la dynamique familiale avec le poids de l'angoisse que risquent d'induire les modifications de regard croisé posé sur le malade.
Dire le diagnostic permet alors de mettre un nom sur les changements dans la relation, de parler de la vie d'avant, des projets perdus, de l'avenir et du jamais plus...
La prise en charge systémique de la famille en incluant le malade comme « sujet parlant » et non seulement comme « patient désigné » objet de soins et fardeau pour l'aidant, prend en compte la notion d'identité familiale avec sa flexibilité, ses capacités d'adaptation et son histoire propre.
Elle fait découvrir l'inefficacité des moyens de communication habituels, ce qui permet de clarifier les conflits induits par le prêt d'intention.
Enfin, dans l'identification des sentiments d'injustice, de dette, de devoir et de culpabilité elle autorise l'intégration de la maladie dans l'histoire familiale et protège ainsi de la menace de rupture et de mise en place de systèmes de défense préjudiciables à la prise en soins.
C'est en mobilisant toutes les ressources imaginatives pour créer et fortifier l'alliance thérapeutique que des solidarités mystérieuses viendront renforcer la notion d'estime de soi et la place unique du malade acteur de sa vie jusqu'au bout et facteur de changement au sein de sa famille.
Inscriptions en ligne et programme
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Université d'été 2013 : Temps forts et mode d'emploi |

Inscriptions et informations pratiques
Les inscriptions à l'Université d'été sont gratuites et obligatoires, dans la limite des places disponibles.
Elles s'effectuent exclusivement en ligne à travers cette page.
Inscriptions en ligne et programme
Lieux et dates
17 septembre - Soirée d'inauguration et projection en avant première de "DEBOUT" en présence de Clémentine Célarié, présidente du Comité d'honneur de l'Université d'été : Zénith Arena de Lille
18 et 19 septembre - Première et seconde journées de l'Université d'été : Zénith Arena de Lille
19 septembre au soir- Soirée débat Notre modèle de santé publique à l’épreuve de la maladie d’Alzheimer : Science-Po Lille (COMPLET)
20 septembre - Journée scientifique Diagnostics précoces : Interrogations éthiques et pratiques : Institut Pasteur, Lille (COMPLET)
Inscriptions en ligne et programme
Les temps forts de l'Université d'été
Soirée débat publique du 17 septembre
Au Zénith de Lille
En présence de Martine AUBRY, Maire de Lille, présidente de Lille Métropole Communauté urbaine,
Daniel LENOIR, Directeur général de l’ARS Nord-Pas-de Calais,
Marie-Odile DESANA, Présidente de l’Association France Alzheimer,
Bruno ANGLÈS D’AURIAC, Président de la Fondation Médéric Alzheimer,
Emmanuel HIRSCH, Professeur à l’université Paris Sud, directeur de l’Espace national de réflexion sur la maladie d’Alzheimer
Conférence de Jean Claude AMEISEN, Professeur d’immunologie à l’université Paris Diderot, président du Comité consultatif national d’éthique
Avant-première du film documentaire « DEBOUT »
Réalisé par Clémentine CÉLARIÉ autour de son ami Thierry MONFRAY
En présence de Clémentine CÉLARIÉ et Thierry MONFRAY
Par souci d’ouverture sur d’autres aspects des réalités humaines et sociales de la maladie, nous avons souhaité associer à cette soirée inaugurale Clémentine CÉLARIÉ et Thierry MONFRAY qui témoignent de la SLA. Dans son esprit même, le Plan Alzheimer 2008-2012 a porté une grande attention aux « maladies apparentées », à ce regard que l’on se doit de porter là où les maladies interrogent les solidarités et nous investissent de responsabilités politiques au vif de la société.
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Université d'été Alzheimer, éthique et société les 18 et 19 septembre
Au Zénith de Lille
Deux jours d'échanges et de partages entre professionnels, aidants, penseurs, autour des enjeux de l'anticipation dans la maladie d'Alzheimer, autour de 7 grandes problématiques :
- Lorsque la maladie s’annonce ; temps des premiers signes et d’incertitudes
- Démarche diagnostique
• Ce que vouloir savoir signifie
• Comprendre la demande, proposer une réponse adaptée
- Transmettre un savoir, le temps propice
- Vivre un savoir, se l’approprier
- Assumer ensemble, anticiper, respecter
Inscriptions en ligne et programme
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Projection de "La tête en l’air" le 18 septembre au soir
Au Zénith de Lille
Un film d'animation d’Igniacio FERRERAS
Après une vie professionnelle bien remplie, la mémoire d’Emilio lui joue des tours… La maison de retraite devient alors une évidence. Il y rencontre Miguel avec qui il se lie d’amitié. A ses côtés, Emilio découvre un nouvel univers.
Ses nouveaux amis sont pleins de fantaisie, ont des souvenirs aussi riches que variés, mais ont aussi leurs petites défaillances dues aux effets du temps. Alors que les premiers signes de la maladie d’Alzheimer apparaissent chez Emilio, Miguel et ses amis vont se mobiliser pour éviter son transfert à l’étage des « causes perdues », le dernier étage tant redouté de la maison de retraite.
Leurs stratagèmes vont rythmer leurs journées et apporter humour et tendresse à leur quotidien.
Inscriptions en ligne et programme
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Hommage à Bernadette Le Nouvel |

Catherine Ollivet
Présidente de France Alzheimer 93, conseiller de l’Espace éthique/IDF
« Croire en la mort comme seule et totale rupture du lien social (environnemental, affectif), c'est croire en la vie humaine et son expression en multiples métamorphoses. »
Psychologue clinicienne à l’Hôpital Broca, Bernadette Le Nouvel a rejoint très tôt notre groupe de recherche et de réflexion consacré à la vieillesse à l’Espace éthique de l’AP-HP.
Cette phrase, extraite d’un de ses écrits est peut être pour moi la plus “significative” de sa propre personnalité : elle croyait intimement en la vie, toutes les vies, humaines ou animales,
Très tôt, il y a bien des années, elle défendait déjà tout autant la présence de l’art que celle des animaux de compagnie dans les établissements d’accueil pour les personnes âgées malades. Elle se battait... toute en sourires et douceur, mais comme elle se battait pour faire progresser ce regard de respect.
Déjà il y a 10 ans, elle consacrait toutes ses vacances à rejoindre à Haïti la mission de l’association Fraternité universelle et y partager la vie des plus pauvres de l’île, leur apporter soins et réconfort.
Et puis il y a 4 ans, elle a choisi de vivre complètement sa “métamorphose” : vivre totalement auprès de ces pauvres parmi les pauvres, rechercher toujours avec son doux entêtement la possibilité de leur redonner vie et dignité.
Elle continuait à suivre avec le plus grand intérêt les travaux de notre groupe dont je lui envoyais fidèlement les comptes rendus et productions de textes, qu’elle lisait.... lorsque parfois, pour une heure ou deux, elle avait de l’électricité pour son ordinateur !
En mai dernier, elle fourmillait encore de projets, et me téléphonait pour organiser un interview téléphonique pour sa radio locale... Elle était très fière de m’annoncer que grâce au miel des ruches qu’elle avait implantées dans la mission, elle pouvait maintenant soigner les escarres de ses malades en fin de vie.
Elle vivait toute la vie des habitants... y compris leurs maladies endémiques, palu, dysenterie. Elle m’avouait sa santé ébranlée, mais sans inquiétude aucune, sereine, et je “voyais” son sourire dans sa voix.
Elle est morte en Haïti le 24 août 2013. Voilà qu’elle a vécu maintenant son ultime métamorphose, et si seule la mort rompt le lien social, elle ne peut rompre la vie partagée par l’Esprit.
Séjour en institution gériatrique, douleurs plurielles et accompagnement à la vie
Bernadette Le Nouvel
Psychologue Clinicienne, Hôpital Broca, AP-HP, membre du groupe de recherche et de réflexion Éthique et vieillesse, Espace éthique/AP-HP (texte rédigé en 2005)
Le déchirement d’une séparation
La fin de la vie, lorsqu'elle est maladive, est rythmée par des crises plus ou moins aisément surmontables par le sujet, en fonction de sa personnalité, de ses ressources intérieures, de son histoire, du contexte dans lequel surviennent ses crises et des moyens institutionnels à disposition pour les traverser. La maladie constitue un ébranlement, une perturbation, voire une rupture avec l’environnement, son mode de vie, ses liens à autrui. À la douleur physique s'associe la douleur morale, intense, de ce nouveau deuil réactivant souvent des deuils plus anciens.
Souvent, la personne âgée malade ayant accès à des soins bénéficiera effectivement d'une chaîne médicale adaptée mais ponctuée de déménagements successifs, synonymes de nouveaux repères environnementaux, sociaux, affectifs, à construire.
L'entrée en moyen séjour, puis le passage en long séjour, ou le retour au domicile, ou bien encore l'entrée en maison de retraite médicalisée, constituent souvent des fractures dans le continuum de vie de la personne âgée, et sont autant de mondes distincts au regard de la prise en charge médico-sociale. Ces lieux sont associés à l'image d'une dégradation de l'état général, qui laisse penser que « plus rien jamais ne sera comme avant ».
Quels moyens mettre concrètement en œuvre pour atténuer la douleur morale inhérente à l'entrée en institution, lors du passage du moyen au long séjour, voire même du long séjour à la maison de retraite ou au domicile, lorsque l'environnement, à peine devenu familier, se fracture à nouveau, que l'événement engendre tristesse, sidération, ou agitation ? Lorsque l'image de soi, réduite aux seuls handicaps, altère ou empêche le plein emploi des facultés restantes ?
Le rôle du psychologue clinicien s'inscrit dans cette volonté, aujourd'hui généralisée en France, d'une prise en charge pluridisciplinaire idéalement “ globale ” (médicale, psychologique, sociologique).
Le soutien psychologique vise à atténuer la charge d'angoisse, les sentiments de culpabilité, les affects dépressifs... inhérents à toute entrée en institution, et qui peuvent s'exprimer contre le patient lui-même et/ou sa famille (repli massif sur soi, syndrome de glissement...) mais aussi de manière très vive à l'encontre du personnel (agressivité, insatisfaction constante...)
Le travail clinique consiste fréquemment à accompagner le patient mais aussi sa famille dans ses réflexions, l'expression de ses angoisses sur le vieillissement, le sens de la vie, le mourir, l'au-delà même, la culpabilité et la terreur d'un châtiment potentiel, la solitude face à soi-même...
L'effet de ces entretiens est également préventif, car ils permettent de désamorcer les conflits s'exprimant habituellement au travers des dysfonctionnements institutionnels, ou tout au moins d'en réduire l'amplitude.
Il n'est pas facile de transcrire la douleur provoquée par le déchirement d'une séparation, ou l'horizon de sa propre finitude. Voici quelques propos saisis sur le vif, dévoilant les remous de l'âme intriqués dans la réalité prosaïque du quotidien.
Paroles de patients
« Quand je pense à mon mari, je me dis mais ou es-tu ? » (Mme veuve P)
« Ramenez-moi à la vie… » (Mme G)
“ Quand on est vieux, on ne sert plus à rien. Les animaux inutiles on les abat… » (Mlle V)
« Voilà, la vie change, et ça fait mal, ça fait mal… » (Mme P)
« Je ne vois jamais mes petits-fils. Ma fille dit que ce n'est pas un endroit pour les enfants… ” (Mme R)
« C'est l'heure des ancêtres, j'ai peur… » (Mr G)
Paroles de familles
« Maman ne me répond pas. Elle ne me reconnaît plus... »(Mme M)
« C'est ma femme qui va mourir. On vient de fêter nos cinquante ans de mariage. C'est toute ma vie qui s'en va… » (Mr R)
« Je l'ai ramené à l'hôpital, désolée, car je le sens capituler, se désintéresser de la vie, du monde extérieur, disant : “ je ne vaux plus rien ! ” À l'hôpital, ils disent, “ il ne veut pas ” et lui répond, “ je ne peux pas ”. Il perd de plus en plus la mémoire, lui qui était un professeur de lycée brillant, un homme actif, énergique et très cultivé ! Je voudrais donc que vous vous penchiez sur son cas, pour savoir si on peut empêcher cette dégradation et lui redonner le goût de vivre… » (Mme C)
« On n'a jamais rien eu de toute notre vie, jamais été malade. On espérait une retraite ma foi simple, mais heureuse. Et voilà ! S'il existe un bon dieu, il ne devrait pas laisser faire ça, c'est trop dur, c'est trop dur ! » (Mme L)
« Je n'apporterai pas de soucoupe pour la plante de ma femme ! Avec le prix que l'on paye, on peut la fournir ! Et pourquoi elle ne remarche pas ? J'ai marché, moi, après mon opération ! » (Mr C)
« C'est long cette maladie, c'est long... Ça dure combien de temps ? Ça fait six ans que je viens… » (Mme T)
« La nuit quand je me réveille, je touche, là, dans le lit, je sens sa place vide, c'est froid… Ça fait mal, vous savez… » (Mme L.)
Paroles de soignants
« On s'adresse à nous pour tout…
Tout ici devient dramatique…
Patients lourds, familles lourdes… »
« La fille de Mme O., très tôt déjà le matin, est là à vérifier ce que l'on fait, elle est toujours sur notre dos. Les têtes de turc c'est l'équipe de garde. C'est le contrôle en continu sur toute la journée, elle reprend la température après nous ! Tout est suspendu à l'état de santé de sa mère. C'était pire il y a trois ans, à l'entrée. »
« Une nouvelle personne est en fin de vie, une patiente en M. S., sur laquelle toute l'équipe avait investi, une crème de malade, gentille... Ça y est, j'ai enfin trouvé l'aumônier que voulait la dame. J'ai commencé les recherches à 13 h 45. C'est fou, il est 16 h 15 ! »
« On prend sur nous, jusqu'au moment où c'est difficile… »
Travailler à l'atténuation de la douleur morale de l'individu consisterait à l'accompagner dans ces passages, à créer des liens entre ces univers, au travers de ses deuils successifs. Ces liens sont encore par endroits à construire.
Un travail approfondi sur l'accueil facilite bien sûr l’acclimatation à un nouvel environnement. Ces moments d'échange développés à l'entrée en institution permettent l'apprentissage d'une vie en collectivité et la reconnaissance d'une individualité. Le canevas de nouveaux moments d'échanges clairement institutionnalisés lors du passage de moyen en long séjour est élaboré, mais son application en est encore au stade expérimental. Il vise à permettre, dans un cadre et une atmosphère conviviale (café, jus d'orange, gâteaux) de (re)présenter l'unité de soins comme une unité de vie.
Par ailleurs, la perception des relations patient/famille/soignants en tant que système permettrait non seulement la reconnaissance d'une douleur plurielle tout aussi spécifique, particulière, unique, de la personne âgée malade, de sa famille, des soignants, mais aussi sa prise en charge commune, interactive, au travers de moments d'échanges, de rencontres, d'apprivoisement mutuel et de reconnaissance.
Analyser et comprendre l'interpénétration des souffrances plurielles, celles qui sont nées de l'angoisse et du désespoir de l'entrée en institution, du deuil d'un corps amoindri et d'un esprit émietté — du sien ou de celui de l'être que l'on aime —, d'une communication estimée impossible, permet de rétablir ou de développer une permanence de liens affectifs et sociaux.
Même dément, un patient est une personne. Le regard que “ je ” lui porte lui confère une identité. Il y a perte de communication lorsqu'il y a perte de reconnaissance de l'humain chez le dément qui nous propose de découvrir et d'expérimenter d'autres vecteurs de communication, même déconcertants.
Se questionner sur les limites jusqu'où l’on peut communiquer, c'est se questionner sur les limites de notre humanité. Croire en la mort comme seule et totale rupture du lien social (environnemental, affectif), c'est croire en la vie humaine et son expression en multiples métamorphoses.
L'accompagnement à la mort est communément admis et développé comme une nécessité. Il conviendrait cependant de réfléchir également et collectivement à l'accompagnement à la vie, en prenant en compte les déménagements successifs d'une personne âgée malade par exemple comme autant de crises, de ruptures générant tensions et conflits. Ils peuvent revêtir les caractéristiques du deuil, réactiver des deuils antérieurs, voire être autant de deuils à répétition. Cet accompagnement particulier porte un intérêt individuel (patient) et collectif (patient/famille/soignants), et peut jouer un rôle de prévention favorisant une meilleure qualité de soins et de vie pour tous.

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Parution |

Maladie d'Alzheimer - Vers un équilibre aidants-aidés
 Elle l’avait aperçu du bout du couloir, debout, avançant d’un pas hésitant et un peu saccadé. Vers quel but se dirigeait son père à cette heure précise de la journée ?
Se dirigeait-il vers sa chambre ? Vers celle du voisin ? Prenait-il un peu d’exercice dans le couloir ? Cherchait-il de la compagnie ? Bernadette arrivait la gorge serrée. L’ambiance de la maison de retraite l’oppressait.
Cet ouvrage met en scène, sous forme de huit nouvelles, des scènes de vie quotidienne, se déroulant en France et aux États-Unis d’Amérique. Les personnages, malades, aidants nous font part tour à tour de leur révolte après le diagnostic ; de leur souffrance face à la perte d’identité ; de leur combat pour dénicher les solutions de soutien ; de leur amour pour entourer leur proche ; de leur relation de couple ou de parents-enfants perturbée. Chacun des chapitres fait l’objet d’un commentaire, en lien avec la thématique, afin d’aider le lecteur dans sa propre recherche et lui permettre d’approfondir les repères relationnels à développer au contact des patients, des aidants ou des familles. Donnons-nous les moyens de rêver d’un monde où la société aura apprivoisé la maladie d’Alzheimer, sera formée à la communication avec les malades au travers d’un nouveau langage pour amoindrir leur souffrance si mal exprimée, offrira aux premiers aidants le répit nécessaire pour transformer les instants critiques en d’autres, plus heureux parce qu’acceptés et compris. Le rêve est déjà en route.
L’auteure
Agnès Brouard a réalisé cet ouvrage en étant guidée par sa triple expérience, celle du monde médical en ayant exercé 25 ans en tant que pharmacien hospitalier, celle, personnelle en tant que soutien auprès de ses parents pour affronter la maladie de son père, enfin celle de son engagement en tant que bénévole auprès de l’Association Alzheimer à San Diego et à San Francisco, en Californie.
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